Assassinat en Tanzanie d’un réfugié tutsi congolais soupçonné d’appartenir au M23

Des réfugiés dans une réunion avec des officiels tanzaniens à Nyarugusu

Un réfugié congolais soupçonné d’appartenir à la rébellion du M23 qui sévit au Nord-Kivu (Est de la RDC) a été assassiné au camp de réfugiés de Nyarugusu en Tanzanie. 

Selon le Collectif SOS Médias Burundi qui livre cette information, il s’agit d’un homme qui venait d’arriver récemment au camp. Il a été tué durant la matinée de jeudi. Des hommes armés en tenue policière et civile ont abattu ce réfugié congolais, issu de la communauté Banyamulenge dans le même camp. Les Banyamulenge sont des Tutsi originaires de la Province congolaise du Sud-Kivu. 

La victime était soupçonnée, selon les sources contactées par SOS Médias Burundi, de faire partie des officiers du M23, un groupe armé composé principalement de Tutsis congolais. La famille de la victime a été placée sous protection.  

Les réfugiés du camp de Nyarugusu dans la partie congolaise ont été réveillés par des crépitements d’armes qui n’ont pas duré longtemps, ce jeudi.

« Des hommes armés en tenue de la police tanzanienne et en civil se sont introduits dans notre maison. Ils ont tiré sur mon mari à bout portant et il est mort sur le champ », raconte sa femme, terrifiée.

Les faits se sont déroulés dans la zone 10. La victime a reçu deux balles dans la poitrine, selon la veuve.

Les assaillants ont d’abord questionné le réfugié sur une probable détention illégale d’armes, ce qu’il a nié avant d’être obligé de sortir de sa chambre, la seule chance de ne pas voir toute sa famille se faire décimer.

« Avant de tirer sur lui, ils ne cessaient de répéter: ‘montre-nous où tu as caché les armes cher général du M23′ », se souvient sa femme. Elle et leurs deux enfants sont terrifiés. Le chef de ménage a été assassiné en leur présence. Ils ont vu du sang jaillir et tâcher leurs vêtements. Le corps a été récupéré par les assaillants. Ils l’ont transporté vers un lieu tenu secret, à bord d’un pick-up.

Policiers en uniforme

Les voisins témoignent qu’ils ont vu beaucoup de policiers en uniforme au moment des faits.

« On a vu au moins trois véhicules de la police et plusieurs éléments armés, les uns en uniforme et d’autres en civil. Ils avaient encerclé toutes les maisons du voisinage. On avait peur nous aussi. C’est maintenant que nous comprenons ce qu’ils voulaient réellement », disent-ils.

Famille placée sous protection

Dans l’après-midi de ce jeudi, « la famille de la victime a été placée sous protection et installée dans l’une des maisons se trouvant à côté du bureau du chef du camp, jalousement gardées par la police », racontent des témoins.

La jeune famille avait fui la RDC avant d’être accueillie au camp de Nyarugusu au début de cette année quand la Tanzanie a reçu une vague de réfugiés congolais fuyant l’Est du vaste pays de l’Afrique centrale, suite aux combats entre l’armée régulière et les rebelles du mouvement M23.

Rebelle

Les causes de l’assassinat de ce Congolais ne sont pas officiellement connues. Sa veuve est allée saisir la police, celle-ci a indiqué « qu’elle n’en sait rien ».

Cependant, des sources sur place parlent « d’un mouvement des agents de renseignements qui l’ont suivi depuis lundi, jusqu’à mercredi dans la soirée et qui ont pris des photos de sa carte de résidence au camp, se faisant passer pour des travailleurs humanitaires ».

Depuis son arrivée à Nyarugusu, l’homme qualifié par ses voisins comme étant « serviable, éveillé et bon », a toujours été soupçonné de faire partie du mouvement du 23 mars, le M23, et de « recruter pour lui », selon un de ses amis.

« Ici, il y a même des gens qui le surnommaient ‘général’. Les renseignements ont toujours été convaincus qu’il jouait un rôle au sein du M23 », poursuit-il.

La police dans le coup?

A la réponse de la police qui dit qu’elle n’en sait rien, les réfugiés n’y croient même pas une seconde.

« Le pick-up est sorti par l’entrée principale gardée par la police. Comment par ailleurs des personnes étrangères peuvent s’introduire dans un aussi vaste camp et se diriger directement vers une maison précise? C’est un coup qui a été minutieusement préparé », réagissent des réfugiés burundais et congolais.

Un réfugié burundais introuvable

Avant de se rendre chez leur victime, les agresseurs ont d’abord kidnappé un réfugié burundais. Norbert Nkundabera habite le village B2.

Après avoir commis le forfait, ils l’ont emmené dans le même pick-up avec le corps du réfugié congolais. Des réfugiés burundais qui se sont confiés à SOS Médias Burundi craignent le pire.

« Il reste le seul témoin oculaire, sans doute qu’ils l’ont également déjà tué », se désolent-ils. Ils pensent qu’il aurait été victime de son nom « Nkundabera » qui s’apparente à celui des membres de la communauté Banyamulenge. Ses voisins exigent une enquête indépendante pour le retrouver.

Des agents du HCR en charge de la protection des réfugiés menacés et la police ont accepté de faire des enquêtes dont les réfugiés fustigent déjà les résultats, car n’ayant pas confiance en la police tanzanienne.

Nyarugusu compte plus de 110 mille réfugiés dont plus de 60 mille Congolais. (Fin)