Environ trois mille ménages doivent quitter les zones d’inondations avant les pluies prochaines, selon la Ville de Kigali

Gatsata, district de Gasabo

Kigali: Cette période qui précède les prochaines pluies sonne comme une alerte pour les ménages vivant dans des maisons fragiles, notamment sur les pentes raides et/ou dans les marais du Rwanda. 

La saison des pluies qui couvre le dernier trimestre de l’année, septembre-décembre selon les prévisions météorologiques du Rwanda, est de retour et les prévisions laissent entendre que la saison pourrait être beaucoup plus sévère que les saisons précédentes, avec un cumul de 800 millimètres dans certaines régions. 

La Ville de Kigali, qui a enregistré plusieurs cas de décès causés par des inondations et des glissements de terrain dans le passé, est particulièrement consciente que le pire pourrait arriver si des précautions ne sont pas prises. 

La Vice-Maire des Affaires Socio-Économiques de la Ville de Kigali, Urujeni Martine, indique que les inondations qui ont tué plus de 100 personnes dans la Province de l’Ouest et du Nord en Mai, ne peuvent leur permettre de croiser les bras. 

« Nous avons été prévenus qu’étant donné la gravité de la pluie, même à Kigali, nous pourrions bientôt assister à des décès similaires, si nous prenons la question à la légère », rappelle –t-elle.

 Renforçant un programme lancé en 2016 pour reloger les personnes dans les zones à haut risque, la Ville a identifié 7 361 ménages censés quitter les lieux. En Mai de cette année, 4 230 d’entre eux ont déménagé, tandis que 3 131 autres familles ont jusqu’au 15 Septembre pour sauver leur vie. 

Sont concernés par la décision les citadins vivant sur des collines avec plus de 50 % de pentes raides qui, selon le Vice-Maire, ne sont pas destinées à la résidence, mais à la forêt. D’autres habitent sur des pentes raides de 30 à 50 %, des endroits qui peuvent accueillir des maisons d’habitation avec des matériaux durables et des exigences de construction particulières qui rendent une maison beaucoup plus solide. 

« Vous vous rendrez compte que dans les deux catégories, les maisons ont été principalement construites en matériaux légers, sans permis de construire », a indiqué Urujeni en faisant référence à certains endroits comme Mukiderenka-Gisozi, district de Gasabo, Kimisagara à Nyarugenge et d’autres. 

Rwampara, district de Nyarugenge

Une autre catégorie qui est censée évacuer est celle des personnes situées à moins de 20 mètres des marais, qui, selon Urujeni, ont été prévenues depuis longtemps. 

« Vous savez que les pluies deviennent plus fortes et vous pouvez le constater depuis nos rivières et nos marais lorsqu’il pleut – les inondations augmentent d’une saison des pluies à l’autre. Nous ne pouvons pas prendre cela à la légère lorsqu’il s’agit de sauver la vie de nos concitoyens. Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre une vie à cause des catastrophes », fait-elle remarquer.

Sont également censées évacuer les personnes situées à proximité des canaux d’eau de Ruhurura, qui se trouvent à moins de 5 mètres, ainsi que celles à proximité d’anciennes carrières qui doivent être réhabilitées avec reboisement. 

La Ville de Kigali permet à la catégorie de ceux qui vivent sur des pentes raides tolérables d’explorer les options disponibles, notamment : vendre leurs parcelles à ceux qui sont en mesure de les développer, ou de les construire conformément au plan directeur de la Ville s’ils ont la capacité financière. 

Ils peuvent également se regrouper et vendre un terrain plus grand à un promoteur immobilier qui pourra construire des installations plus grandes pouvant accueillir les propriétaires et disposer de plus d’espace pour davantage de clients, comme dans le cas du projet commercial Mpazi à Cyahafi. 

Urujeni reconnaît que dans plusieurs cas, les citadins qui ont construit dans ces zones à risque ont été, dans une certaine mesure, protégés par certains dirigeants locaux, mais cela ne rend pas la Ville responsable de leurs erreurs.

« Si un dirigeant local est corrompu, il en répondra individuellement. Nous avertissons toujours les gens pour qu’ils dénoncent ce genre de dirigeants. Sinon, nous ne pouvons intervenir que pour soutenir une personne individuelle sur le plan social, et non pas parce qu’elle est de connivence avec un dirigeant local pour commettre des erreurs », a-t-elle mis en garde. 

Les personnes concernées s’expriment

En parcourant différents quartiers, notamment ceux en forte pente, la marque X ou tout simplement un mot swahili Towa qui signifie « enlever » est fréquente. C’est un avertissement que la maison doit être démolie. 

Depuis 29 ans, Ndagijiama Thierry est un résident du village Hanika, cellule Nyamabuye dans le secteur Gatsata du district de Gasabo où il a construit une maison et hébergé sa famille. Il doit également déménager dans les délais impartis, pour s’assurer qu’il se conforme aux instructions de la ville de Kigali, qui visent à « sauver des vies ». 

Il a dit que quitter un endroit où vous avez vécu pendant trois décennies n’est pas une chose facile. « Nous serions ravis de partir, mais étant donné que nous avons des titres fonciers selon lesquels il s’agit des zones résidentielles, le Gouvernement devrait nous traiter avec des frais d’expropriation », a-t-il confié.

« Nous pensons que le budget national peut nous offrir une place. » 

Les habitants comme Ndagijimana affirment vivre dans cette zone depuis plusieurs années jusqu’aujourd’hui, sans dommage. Ils ne croient pas que cette fois-ci, les choses ont changé avec la saison des pluies, beaucoup plus sévère avec le changement climatique. Ils ne croient pas qu’un danger peut les surprendre comme cela a été le cas dans certaines régions dans un passé proche. 

Judith Uwantege, mère de quatre enfants qui vit à Gatsata depuis dix ans, partage ce point de vue. « Déménager une famille nécessite des préparatifs minutieux. Ce n’est pas facile à mettre en œuvre, car nous craignons en fait que le prochain endroit où nous irons puisse également être traité comme à haut risque à l’avenir », a-t-elle dit.

« Au cours des dix dernières années, nous avons été en sécurité. Si quelque chose arrive ici, cela peut arriver même là-bas. Je propose qu’ils nous donnent une autorisation pour la réhabilitation de nos maisons afin qu’elles puissent répondre aux normes. De l’autre côté, le gouvernement peut renforcer la lutte contre l’érosion sur nos collines pour que nous puissions rester à notre place », propose-t-elle.

Uwantege estime que sa petite maison est la seule chose qu’elle peut appeler chez elle, car elle est arrivée en ville après avoir tout vendu dans son village. (Fin)