Génocide à Cyangugu: Actes de violence contre les Tutsi après la mort du Président Melchior Ndadaye du Burundi en 1993

Comme l’explique l’étude menée par la Commission Nationale de Lutte contre le Génocide (CNLG) sur l’histoire du génocide contre les Tutsi dans l’ancienne préfecture de Cyangugu, en juin 1993, des élections présidentielles se sont déroulées au Burundi, remportées par le parti FRODEBU, donc mettant Melchior Ndadaye au pouvoir après avoir battu le major Pierre Buyoya.

La victoire a été bien accueillie par le Rwanda car le Burundi allait être dirigé par un Hutu. Cela a entraîné le rapatriement des nombreux réfugiés hutus burundais qui avaient fui au Rwanda en 1972, 1988 et 1991-1992, dont beaucoup ont été intégrés dans l’administration et l’armée.

Cependant, cela a duré une courte période car dans la nuit du 20 au 21 octobre 1993, le Président Melchior Ndadaye a été assassiné. Sa mort a été suivie par la chasse  des Hutus à différents postes importantes dans l’administration du pays, des parlementaires, des gouverneurs de province et d’autres. Ces turbulences ont entraîné les massacres de certains d’entre eux tandis que de nombreux autres ont fui à nouveau au Rwanda, notamment à Bugarama, ancienne préfecture de cyangugu et à Butare entre autres.

Les Burundais qui ont fui vers la préfecture de Cyangugu, en particulier dans la commune de Bugarama, étaient dispersés parmi les citoyens. Une fois que les autorités ont décidé  de les installer, ils ont été rassemblés et hébergés dans le camp de réfugiés établi dans le centre d’enseignement rural et artisanal intégré (CERAI) qui se trouvait à proximité des bureaux de la commune de Bugarama dans le secteur de Muganza.

Après l’installation des réfugiés burundais dans ce camp, ceux-ci ont continué à semer la zizanie entre Hutu et Tutsi, arguant que les Tutsi étaient derrière ce qui se passait au Burundi et que c’étaient ceux qui avaient tué le président Ndadaye et expulsaient à nouveau les Hutu du pays. Cette idéologie de haine et de discrimination a abouti à différents actes de violence contre les Tutsi dans la préfecture de Cyangugu.

Dans la commune de Cyimbogo, après la mort du président burundais Melchior Ndadaye, un barrage routier a été érigé dans un lieu appelé Rwimitereri. Ceux qui se trouvaient sur le barrage routier, y compris Jean de Dieu et d’autres, avaient l’habitude de tourmenter les passagers en battant les Tutsi qui passaient par là. Parmi les personnes battues au barrage routier figurent Kurimpuzu Vincent de l’ancien secteur de Nyakarenzo, cellule de Gituza.

Dans la commune de Gishoma, la mort du président Ndadaye a été suivie d’actes de violence contre les Tutsi, au cours desquels certains ont été tués comme Aphrodis et d’autres.

Dans la commune de Nyakabuye, les Tutsi ont également été visés, gravement persécutés sur des allégations selon lesquelles le président Ndadaye aurait été tué par leurs collègues Tutsi du Burundi qui auraient par ailleurs forcé les Hutu à l’exil. Hormis l’emprisonnement, pour tout mouvement, les Tutsi étaient dans la peur, bloqués et persécutés.

Dans la commune de Bugarama, il y a eu également des persécutions contre les Tutsi où beaucoup d’entre eux ont été détenus au cachot de la commune. Les réfugiés burundais qui vivaient normalement à Muganza sur la 8e route ont conspiré avec des miliciens Interahamwe pour persécuter les Tutsi, arguant que leurs collègues burundais avaient tué le président Ndadaye. Ils ont persécuté de nombreux Tutsi, dont l’infirmière Sezibera Patrick, l’enseignant Serugo Jacques et d’autres.

Dans la commune de Karengera, Nicolas Bucyana de Kareba dans le secteur de Butare a été assassiné au centre commercial de Cyicarabagabo. Ils lui ont tendu en foule pendant la nuit et lui ont coupé la tête. A Muramba, Théobard Murindabigwi de Mwezi a également été tué tandis qu’à Bweyeye ils ont tué Herson, fils de Nyamunana, qu’ils ont enlevé alors qu’il venait d’acheter de la bière de banane qu’il revendrait comme d’habitude. Ils l’ont enlevé au terrain de jeu de Bweyeye et l’ont battu jusqu’à sa mort.

Lorsque le bourgmestre de la commune de Karengera, Fulgence Natete, y est arrivé pour une réunion, il a été informé de ce qui s’était passé mais n’a rien fait; il a plutôt dit que ces gens et leurs suppôts mourraient tous ensemble. (Fin)