La ligue Iteka accuse le régime burundais de discrimination ethnique

des membres du CNDD-FDD dans une campagne électorale à Bujumbura

La ligue des droits de l’homme Iteka, la plus ancienne du Burundi, accuse le parti au pouvoir (le CNDD-FDD) d’avoir violé les équilibres ethniques établis par la constitution et les accords d’Arusha (60 % Hutu/40 % Tutsi dans la fonction publique et 50/50 dans le secteur de la sécurité).

Le rapport sorti le 10 février 2021 et consulté par le Collectif SOS Médias Burundi met un accent particulier sur la discrimination dans la nomination des fonctionnaires qui occupent les postes clés dans différents secteurs de la vie du pays.

Le rapport détaille les résultats dans les domaines politique, sanitaire, judiciaire, sécuritaire et éducatif. « Sur 1309 cadres de l’État, 1227 proviennent du CNDD-FDD, 10 sont de l’Uprona au moment où un seul est membre du CNL. Dans les corps de défense et de sécurité, sur 58 cadres, seuls 7 sont de l’ethnie Tutsi », affirme le rapport.

Pour le secteur sanitaire, 88,6% de cadres sont Hutus, soit 596 sur un total de 673. En plus de l’appartenance ethnique, 99,9% sont militants du parti présidentiel, souligne le rapport.

Le constat est le même dans les domaines éducatif et judiciaire. La ligue Iteka confirme respectivement que 91,8% de cadres sont Hutus contre 8,2% de Tutsis avec une estimation d’appartenance au CNDD-FDD de 96,3% et 76,8% de Hutus contre 22,7% de Tutsis.

L’enquête s’est aussi penchée sur les administrateurs communaux et chefs de province. « 15 sur 18 gouverneurs sont Hutus, et 80 sur 118 administrateurs sont de la même ethnie dont seulement 2 de l’Uprona ».

Enfin, c’est le même constat dans la police. Sur 18 commissaires provinciaux que compte le pays, 15 sont Hutus, et tous les représentants provinciaux du service national de renseignements sont aussi de la même ethnie Hutue.

La ligue Iteka craint que le pays risque de sombrer encore une fois dans des conflits ethniques. Elle rappelle que la même pratique a été utilisée dans le passé en 1993 avec la victoire du parti Sahwanya FRODEBU quand une purge systématique au sein des services publics avait eu lieu.

Elle demande au sénat d’utiliser les résultats du recensement ethnique mené dans les services publics pour faire respecter la constitution et les accords d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi.

Le Burundi a la même composition ethnique que son voisin le Rwanda qui a connu un génocide contre les Tutsis en 1994.

Au Burundi, les deux ethnies peinent à s’entendre sur la qualification des « massacres » qui ont emporté les leurs à des époques différentes.

Les Hutus au pouvoir actuellement veulent à tout prix que les massacres de 1972 qui ont emporté plus de Hutus que de Tutsis soient qualifiés de « génocide » au moment où les Tutsis souhaitent plutôt que la tragédie qui s’est abattue sur eux suite à l’assassinat du premier président Hutu démocratiquement élu Melchior Ndadaye en 1993 soit déclarée « génocide ». (Fin)