LE 10 MAI 1994: LE CONTENU DU RAPPORT ETABLI PAR LE COL. RWABALINDA APRES SON VOYAGE EN France*

La France était prête à poursuivre  son soutien aux FAR, malgré le massacre des Tutsi par l’Etat de Theodore Sindikubwabo, son gouvernement et son armée.

1. Le soutien du Rwanda par la France au plan de la politique internationale

Il s’agissait du soutien du Rwanda par la France au plan de la politique internationale; de la présence physique des militaires français au Rwanda, ou tout au moins d’un contingent d’instructeurs pour les actions de « coups de main » pendant le génocide; de « l’utilisation indirecte des troupes étrangères régulières ou non », ce qui fait allusion à l’envoi possible de mercenaires, évoqué par certains, mais que nous n’aborderons pas ici faute d’éléments suffisamment précis. 

Les priorités suivantes ont été abordées.  a. Le soutien du Rwanda par la France sur le plan de la politique internationale.  b. La présence physique des militaires Français au Rwanda ou tout au moins d’un contingent d’instructeurs pour les actions de coups de mains dans le cadre la coopération. c. L’utilisation indirecte des troupes étrangères régulières ou non. […].

Huchon conseillait au Rwanda de faire un gros travail de sensibilisation internationale pour améliorer son image à l’étranger et rendre le FPR responsable des massacres :« (…) le général HUCHON m’a clairement fait comprendre que les militaires français avaientlesmainsetlespiedsliéspourfaireunequelconqueinterventionennotrefaveuràcause  de  l’opinion  des  medias  que  seul  le  FPR  semble  piloter. 

Si  rien  n’est  fait pour retourner l’image du pays à l’extérieur, les responsables militaires et politiques du Rwanda seront tenus responsables des massacres commis au Rwanda. Il est revenu sur ce point plusieurs fois ».

2. La RTLM parle du soutien français et continu d’inciter au massacre des Tutsi

Ce conseil donné par le général Huchon à Ephrem Rwabalinda fut pris très au sérieux par l’hôte rwandais, puisque dans les conclusions de son rapport de mission, il nota : « Soigner davantage l’image du pays à l’extérieur constitue une des priorités à NE PAS perdre de vue. Les appareils téléphoniques que j’apporte devraient nous aider à sortir de l’isolement vis-à- vis de l’étranger ». Et il révéla que la France était déjà en action pour apporter son soutien  au gouvernement intérimaire et à ses forces armées : « la maison1 militaire de coopération prépare les actions de secours à mener à notre faveur».

Juste après le retour de Rwabalinda au Rwanda (il est reparti le 13 mai de Paris), on assiste dans les médias dirigés par le camp du génocide à un certain nombre de changements, un certain optimisme et le souhait de contrôler les dégâts d’image provoqués par le génocide. Mais, il faut souligner qu’il n’y a jamais eu de normalisation du gouvernement du génocide, du régime génocidaire, au mois de mai. Les Tutsi ont continué à être massacrés.

La RTLM continue d’inciter au massacre des Tutsi : la poursuite voire le renforcement de la propagande telle qu’elle fonctionne depuis déjà des semaines : le dialogue avec les miliciens sur les barrières, l’encouragement au « travail », l’affirmation incessante que les Tutsi se suicident, et qu’au fond ce sont peut-être eux, les Tutsi, qui sont les responsables de toutes les violences.

Le rapport de Rwabalinda est daté du 16 mai à Gitarama où se trouvait à cette époque le gouvernement intérimaire. Le 18 mai, la RTLM par la voix de Habimana Kantano, informe ses auditeurs de la reprise de l’aide française ainsi que du conseil de discrétion dans les massacres :« Une bonne nouvelle pour les Rwandais. Les nouvelles commencent vraiment à être bonnes. C’est que la France a recommencé à nous aider, avec une aide importante en plus, avec des promesses de l’accroître.

Seulement, afin que cette bonne nouvelle continue à nous parvenir, ils demandent qu’il n’y ait plus de cadavre humain visible sur la route, et aussi qu’il n’y ait plus de personnes tuant une autre pendant que d’autres assistent en riant sans la remettre aux autorités2».

Il y a lieu de penser que l’information de la reprise de l’aide militaire française provenait de Rwabalinda et que le message demandant de cacher les tueries constituait la mise en œuvre du conseil donné par le général Huchon à ce dernier.

Enfin, il faut ici rappeler  qu’une association  négationniste, JAMBO ASBL basée en Belgique, et composée de fils et filles dont les parents ont joué un rôle de premier plan dans le génocide perpétré contre les Tutsi, est dirigée aujourd’hui par Robert  Mugabowindekwe, le fils du Lt Colonel Ephrem Rwabalinda.

Le gouvernement génocidaire a continué à recevoir le soutien militaire de la France, par la complicité des militaires français, et par la décision des autorités françaises, à la tête le président Mitterrand. (Fin)

Fait à Kigali, 10 Mai 2020

*Par Dr BIZIMANA Jean-Damascène, Secrétaire Exécutif/Commission Nationale de Lutte contre le Génocide, CNLG.