«Mukona ka Mashyuza» ou le lieu de rencontre des eaux des rivières Akanyaru et Nyabarongo constitue un site à valoriser

Le groupe “Ntukazime” au site de rencontre des eaux de l’Akanyaru et de la Nyabarongo.

Ntarama, Bugesera: «Mukona ka Mashyuza » ou le lieu de rencontre des eaux des rivières Akanyaru et Nyabarongo constitue un site à valoriser surtout qu’il est fréquemment visité pour son importance symbolique des eaux qui s’y donnent rendez-vous pour former la rivière Akagera.

Le site est aussi communément appelé « ku Kagoma ou mu Masangano ». Il est le point de rencontre de trois districts frontaliers qui sont Bugesera, Kamonyi et Nyarugenge.

Le site est situé à 8 km du Mémorial de Ntarama. Il offre un  paysage splendide entouré de hautes collines de Butamwa au Nord et des collines du district de Kamonyi. Deux immenses marais de papyrus de l’Akanyaru et de la Nyabarongo forment l’arrière-fond qui retient un regard émerveillé. Beaucoup de Tutsi qui avaient trouvé refuge dans ce marais ont certes été tués par des miliciens et des soldats du régime génocidaire de 19994. Mais fort heureusement, deux mille autres Tutsi ont été sortis vivants par les combattants du FPR qui ont stoppé le génocide et libéré le pays.

« Nous sommes des survivants des tueries des Tutsi de 1994. Nous avions trouvé refuge dans ce marais où nous nous sommes repliés. Les victimes de ce marais sont innombrables. Elles venaient de Ntarama, Gashora, Gitarama, etc… Tous doivent la vie aux combattants du FPR qui les ont secourus. Nous sommes reconnaissants envers eux », témoigne André Harerimana, rescapé du marais de Cyimiri.

Visite au site mémorial de Ntarama/Bugesera

Halerimana livre son témoignage à un groupe de vingt visiteurs venus de Kigali et qui sont des ex-agents complémentaires rwandais ayant servi au Burundi avant leur retour au pays après 1994.

Ces vingt visiteurs figurent parmi les 1804 agents rwandais retraités, mais qui revendiquent leur pension de retraite pour avoir travaillé pour le gouvernement du Burundi. Pour certains, cette pension a été envoyée au Rwanda. Mais d’autres l’attendent toujours. Dans l’ensemble, il s’agit d’un groupe dynamique, patriote, qui n’était pas au Rwanda pendant le génocide de 1994, mais qui tient à visiter des sites mémoriaux comme Ntarama et ailleurs pour s’incliner devant les restes des victimes. Surtout que ces victimes sont des connaissances et des parents de certains des membres de ce groupe dénommé “Ntukazime” que l’on peut traduire pas « Loin de toi l’extinction ».

Le groupe a donc visité le site mémorial de Ntarama ce week-end du 06 novembre. Il a pu écouter des témoignages sur le supplice enduré par les victimes. Puis il s’est rendu plus bas, au lieu appelé  « CND » en face du marais où ont été suppliciés d’innombrables Tutsi.

« Ntarama fait partie de la région du Bugesera où ont été bannis des Tutsi emmenés de force à partir des différentes régions du pays. Zone infectée de moustiques et de mouches tsé-tsé, sans eaux, invivable. C’est dans ce ghetto qu’on avait parqué des Tutsi pour les laisser périr à petit feu de maladies diverses, de malaria, de mouche tsé-tsé, de famine, malnutrition et de dysenterie. La zone est coincée de toutes parts par des rivières, lacs et marais. La seule issue n’est que le chemin vers le Burundi au Sud. Il n’était pas facile de se frayer un chemin pour fuir les agresseurs ou se procurer de la nourriture. Certains des Tutsi y sont effectivement morts de ces maux. Les survivants ont affronté le génocide de 1994. Certains d’entre eux ont pu avoir la vie sauve grâce à l’intervention de combattants du FPR. C’est cette mémoire du passé que nous voulons perpétuer par notre visite », confie Gérard Karamutsa.

Le groupe « Ntukazime » a aussi effectué une visite à la Fondation Serge Gasore située à 5 Km de Ntarama.

Gasore est un jeune rescapé du marais de Cyimiri. Devenu athlète aux USA, il a décidé de créer un vaste projet qui englobe cinq interventions principales entrain de booster la vie des gens de Ntarama : le premier volet est la transformation de la famille par la réconciliation post génocide ; puis le poste de santé doté de divers services essentiels dont le labo et la maternité, ainsi que la santé sexuelle et reproductive ou planning familial. Le troisième volet est l’éducation avec une école primaire de complète qui compte 536 élèves, des computers, etc…

Le 4ème volet est l’encadrement et la formation en couture de 25 jeunes filles-mères qui apprennent un métier pendant six mois pour rentrer avec une machine à coudre et l’équipement afin de commencer à travailler et être autonomes. Puis il y a enfin l’appui aux Jeunes, avec un centre de formation en cyclisme pour des jeunes filles.

La Fondation est dotée d’élevage de vaches, porcs et poules, d’une boulangerie, de champs et cultures, d’un terrain de football, volley et basket, d’une grande salle polyvalente pour organiser des réceptions. Le domaine forme un total de 16 hectares et il ne cesse de s’agrandir d’années en années.

Le groupe Ntukazime a promis d’apporter sa contribution dans des programmes où la Fondation aura besoin de ses services, notamment dans des conférences sur l’histoire du pays et la lutte contre l’idéologie du génocide.

Notons que Serge Gasore figure parmi les Abarinzi b’Igihango ou Protecteurs du Pacte de Solidarité des Rwandais au niveau national. Sa Fondation demeure utile aux habitants de Ntarama, surtout que Gasore a pardonné publiquement aux tueurs de sa famille et qu’il aide même les familles de ceux qui ont exterminé les siens. Un exemple qui privilégie de bâtir un meilleur futur pour tous. (A suivre…)