Préparation du génocide à Ruhengeri: massacres délibérés de Tutsi à Kinigi en 1991

La récente étude menée par la Commission Nationale de Lutte contre le Génocide (CNLG) sur l’histoire du génocide perpétré contre les Tutsi dans l’ancienne préfecture de Ruhengeri a révélé qu’il y avait eu des massacres délibérés de Tutsi dans différentes communes de cette préfecture entre 1990 et 1993 dans la perspective de la préparation du génocide de 1994.

L’étude montre que les tueries délibérées ont commencé après que le 23 janvier 1991, RPA, une branche militaire, ait lancé une grande attaque dans la ville de Ruhengeri. Depuis lors, des tueries systématiques ont commencé, visant en particulier les Bagogwe des communes de Nkuli, Mukingo et Kinigi.

Le présent article porte sur les massacres délibérés de Tutsi en 1991 dans l’ancienne commune de Kinigi, l’une des 16 communes qui constituaient l’ancienne préfecture de Ruhengeri, comme l’indique l’étude susmentionnée.

L’étude montre que, dans l’ancienne commune de Kinigi, les Tutsi ont été tués les 26 et 27 janvier 1991.

Comme le rapportent les témoins, le premier Tutsi a été tué le 26 janvier 1991, alors qu’il rencontrât une foule de femmes à Bisate (actuellement dans le secteur de Kinigi) qui avaient fui à cause des attaques de RPA.

L’un des témoins a raconté que «celui qui s’appelait Samuel Bagayindiro avait été libéré le 23 janvier 1991 lorsque les troupes de RPA avaient ouvert la prison de Ruhengeri – il avait été arrêté pour avoir été prétendument un espion de RPA. Après sa libération, il est venu et a constaté que sa famille s’était enfuie et a tenté de suivre son itinéraire. Le 26 janvier 1991, à son arrivée à Bisate, il rencontra une foule de femmes qui le lapidèrent en disant: «Ces cafards sont ceux qui nous affligent».

Les Tutsi qui ont été tués à ce moment-là ont été enlevés à leurs domiciles et rassemblés dans un lieu appelé «Rondpoint» situé à proximité des bureaux de la commune de Kinigi. Ils ont d’abord été battus, puis fusillés par des soldats.

Thaddée Gasana, bourgmestre de la commune, soldats et agents de la police communale étaient impliqués dans les massacres des Tutsi dans l’ancienne commune de Kinigi.

Un rapport international de la Commission des Droits de l’Homme montre que le 27 janvier 1991, vers 15 heures, tous les conseillers des secteurs (Konseye) de la commune, dirigés par le bourgmestre Thaddée Gasana, ont enlevé les Tutsi Bagogwe et les ont emmenés à proximité des bureaux de la commune à un endroit appelé Rondpoint et les ont tués.

Ils ont été tués avec des machettes, des lances, des pierres et des morceaux de bambous pointus (ibisuti). Par après, des soldats sont venus et ont tiré sur chacun d’eux pour s’assurer que personne ne survit. Plus de 60 Tutsi ont été tués ce jour-là. Gasana Thaddée, le bourgmestre de la commune avec les soldats s’étaient efforcé d’exterminer les Tutsi.

Les gardes du parc national ont également joué un rôle dans l’assassinat des Tutsi et dans l’interception de ceux qui tentaient de fuir vers le Zaïre. Ceux qu’ils interceptaient étaient tués sur le coup.

Diogène Bideri, dans son livre «Le massacre des Bagogwe, un prélude au génocide des Tutsi, Rwanda: 1990-1993”» dit que le commandant de la gendarmerie de Ruhengeri, Jean Marie Vianney Nzapfakumunsi, a joué un rôle dans le meurtre des Tutsi dans les communes Kinigi et Mukingo. Les gendarmes qu’il a commandés sont ceux qui ont tué les Tutsi dans ces communes sous prétexte de combattre les troupes de RPA_inkotanyi et que ces derniers avaient réussi à arriver en ville de Ruhengeri grâce au soutien de leurs relatifs Tutsi (Bideri 2009, p. 65).

Le rapport de la Commission Internationale d’Enquêtes sur les violations des Droits de l’Homme au Rwanda depuis le 1er octobre 1990 montre que depuis octobre 1990, les conseillers des secteurs ont tenu plusieurs réunions pour inciter à haïr et à tuer les Tutsi.

Au cours de ces réunions, aucun Tutsi n’a été autorisé à y assister. Le rapport indique que les conseillers de secteurs qui ont conspiré avec le bourgmestre Thaddée Gasana comprennent Ndagije du secteur Gihora, Matayo du secteur Kagano, Bizimana du secteur Musanze et le conseiller du secteur de Nyarugina.

Dans la commune de Kinigi, les massacres des Tutsi ont eu lieu encore le 28 juillet 1991 après l’attaque des troupes de RPA_inkotanyi dans le secteur de Bisate à travers le secteur de Nyabisinde.

Chaque fois que les troupes de RPA menaient une attaque, les populations Tutsi de la région et de ses environs étaient tuées. C’est dans cette perspective que des soldats des Forces armées rwandaises (FAR) accompagnés de civils comme Munyandoha Mathias et Ndagijimana Jean Damascène sont allés enlever les hommes Tutsi du secteur de Nyabisinde et les ont tués.

Les victimes tuées ce jour-là et qui étaient identifiées comprennent Gashabuka, Kayijamahe, Hategekimana Michel, Rurangwa et Rwabukwisi.

Parmi les autres personnes impliquées dans les massacres des Tutsi dans la commune de Kinigi, on trouve Munyakarambi du secteur de Nyarugina, Semibumbe, responsable de la cellule de Kidendezi, un garde du parc national appelé Tengura, Kanyamiheto Kavarisi, conseiller de secteur, Rwamahoro Kabuga responsable de la cellule et autres. Au cours de cette période, même dans d’autres communes de l’ancienne préfecture de Ruhengeri, les Tutsi ont été tués. (Fin).