«Twahirwa disait aux Interahamwe de violer par la force les femmes Tutsi» – Témoin

Dans le cadre du procès pour Génocide contre les Tutsis qui se poursuit depuis le 09 Octobre en Belgique et où sont jugés les prévenus Séraphin Twahirwa et Pierre Basabose, plusieurs témoins à charge ont été entendus. Parmi ces témoins, une dame a déposé hier mardi après-midi son témoignage. C’est une mère de famille indépendante originaire du Rwanda.

Avant de venir témoigner, elle a été interrogée à deux reprises alors qu’elle se trouvait au Rwanda. Ce témoin dit que pendant le Génocide, il avait 18 ans. Sa mère et ses frères ont été tués par les Interahamwe.

Il dit qu’en avril 1994, ils vivaient dans le quartier Karambo, qui se trouve maintenant dans le secteur de Gatenga, et il a également déclaré au tribunal que le témoignage qu’il a donné ici, devant le tribunal, résulte de ce qu’il a vu et vécu de ses propres yeux.

 Il dit que Twahirwa est venu à la maison où ils habitaient et a dit qu’il était devenu président des Interahamwe et qu’il a immédiatement accroché le drapeau du parti au pouvoir le MRND sur sa maison.

Lorsqu’on lui a demandé si Twahirwa dont elle parle était celui qui était debout devant le tribunal, elle a confirmé, ajoutant qu’il habitait au même endroit que Twahirwa, à une distance d’un trajet court de dix à vingt minutes.

« Lorsque le Génocide a commencé, je n’étais pas chez moi, parce que nous avions fui chez les Peres Sélésiens de Gatenga », affirme le témoin.

Cette mère dit qu’avant le Génocide, les Tutsis qui vivaient à Karambo fuyaient souvent, certains allaient chez Carlos, à cause des miliciens de Twahirwa qui voulaient les violer de force et les exterminer.

Il dit qu’en février 1994, les Interahamwe envoyés par Twahirwa ont attaqué la maison où se trouvait sa famille, ils ont commencé à les torturer, ils leur ont dit de se mettre à genoux. Ces interahamwe se sont rendus chez un homme nommé Vianney et ils l’ont tué, lui et sa femme.

Twahirwa disait aux interahamwe de violer de force les femmes Tutsi et de savoir comment est leur sexe.

Le témoin a rapporté qu’un milicien nommé Munyakazi et entraîné par Twahirwa l’a violé. Le témoin a subi cette agression sexuelle alors qu’il vendait des articles dans sa boutique. Il venait de croiser ce milicien assis sous un arbre en buvant du whisky avec compagnons.

Après le forfait, la victime est rentrée dans sa famille et a dit ce qui s’était passé. Sa famille lui a recommandé de retourner chez Carlos et de s’y cacher.

Il a ensuite décrit comment il avait vu de ses propres yeux comment la maison de la famille Roger Ndengeyingoma, qui comptait onze enfants, a été incendiée avec des pneus, pendant que Ndengeyingoma se cachait dans les buissons.

Lorsque l’épouse de Ndengeyingoma a vu l’incendie, elle est sortie de la maison et a demandé pardon. Twahirwa, qui était avec le groupe d’incendieurs a sorti son pistolet et a tiré sur l’épouse de Ndengeyingoma.

Ce témoin dit que Twahirwa est bien connu comme étant un Interahamwe qui voyageait dans une voiture qui portait le drapeau du MRND et la photo de Habyarimana. La famille de Ndengeyingoma a été lynchée parce qu’elle était membre du parti (PSD) opposé au régime de Habyarimana.

Ce témoin rapporte que les membres de sa famille ont été tués par des miliciens accompagnés par des soldats de la Garde Présidentielle (GP).

Tous ces groupes de miliciens tueurs ont été entraînés par Séraphin Twahirwa, connu sous le nom de « Kihebe », ce qui signifie « suicidaire, terroriste ». Des armes ont été distribuées à ces miliciens pour exterminer des Tutsis.

Interrogé sur Basabose, le témoin a répondu qu’il avait entendu parler de lui, qu’il n’avait jamais vu son visage, mais que Basabose était l’un des principaux actionnaires de la RTLM.

L’avocat de Twahirwa a demandé au témoin de raconter ce qu’il faisait chaque jour depuis le 7 avril, alors que cet avocat n’avait posé aucune question aux deux premiers témoins.

Ce témoin venu du Rwanda a été interrogé par un juré, par le Président, par le Procureur, et par les avocats de ceux qui demandent réparation dans cette affaire.

 L’avocat de Twahirwa a posé à ce témoin des questions centrées sur ce qui lui avait été demandé à Kigali afin de savoir si ce témoin avait répondu de la même façon qu’à Kigali.

Cela se fait lors d’un procès afin de découvrir la vérité à partir de ce que le témoin dit avoir vu de ses propres yeux, et sur ce qu’il a entendu dire ou sur ce que d’autres lui ont rapporté.

Après l’interrogation du témoin, la défense de Twahirwa a déclaré que ce témoin n’avait aucun moyen de connaître toutes les informations qu’il donnait, alors qu’il se cachait.

Le président du tribunal a demandé à ce témoin si ce qu’il avait dit était vrai et il a répondu que le témoignage qu’il avait fourni devant le tribunal était vrai.

Parmi les autres témoins qui ont déposé, il y avait celui qui a témoigné du côté des parties civiles et qui a commencé par dire qu’il a 37 ans.

Il a déclaré que la raison pour laquelle il avait décidé de témoigner était parce que sa famille avait été tuée et qu’elle vivait à Gikondo pendant le Génocide. C’est là que le témoin a grandi, en compagnie des autres membres de sa famille proche.

Ce jeune homme raconte que peu avant le Génocide, il voyait souvent des Interahamwe dans les rues de Gikondo près de chez lui. Lorsque la chute de l’avion de Habyarimana a eu lieu, ce témoin a déclaré qu’il n’était pas chez lui à Gikondo, mais qu’il était allé rendre visite à sa tante qui avait un mari français (blanc).

C’est durant cette période qu’il a appris que ses parents, ses frères et sœurs avaient été tués là où ils vivaient à Gikondo, près de chez Twahirwa. Ce témoin dit qu’il a vécu une vie d’une grande tristesse, car il demandait toujours où étaient ses parents et ses proches.

Après le génocide, ce sont ses parents adoptifs qui l’ont aidé à continuer sa vie. Il est venu également visiter le Rwanda, et le Mémorial du Génocide de Kigali à Gisozi pour mieux comprendre l’histoire du Génocide.

Lorsqu’il a demandé ce qui était arrivé à ses parents, on lui a répondu qu’ils avaient été tués par les miliciens.

Durant le témoignage, ce jeune homme a été saisi par un coup de chagrin et il s’est mis à pleurer.

Un autre témoin qui a déposé devant les jurés était une mère née au Rwanda en 1954, actuellement mère à la retraite de trois enfants, mariée à un homme blanc.

Cette mère dit que ceux qui ont été tués pendant le Génocide étaient des gens qui avaient des familles et qui prenaient soin d’elles. Ils ne voulaient rien d’autre que vivre, mais que les enfants sont devenus orphelins à cause du Génocide de 1994. 

Cette mère a raconté la douloureuse histoire qu’elle a vécue et qui a causé la mort des membres de sa famille avant le Génocide, et elle est même allée jusqu’à fuir vers le Burundi voisin.

Plus tard, ce témoin est revenu au Rwanda avant le Génocide. La situation lui a fait prendre conscience de la mauvaise vie dans laquelle vivaient les membres de sa famille tutsie.

Cette mère dit qu’en 1991, les Bagogwe ont été tués. En 1992, les Tutsis qui vivaient au Bugesera ont commencé à être tués et leurs maisons ont été détruites. Il dit que certains membres de sa famille ont été tués au Bugesera en 1992, et que les autres ont été tués lors du Génocide de 1994 contre les Tutsis.

Il dit que lorsque Gatabazi, qui était membre du parti PSD, a été tué le 21 février 1994, les choses ont empiré à Kigali ; à ce moment-là des pierres ont été lancées sur les maisons des Tutsis, et certains ont été tués. Puis a suivi le meurtre de Bucyana, qui était membre du parti CDR.

Il explique qu’il est très difficile de parler du Génocide après avoir perdu des membres de sa famille, mais il a survécu et il vit en France.

Ce témoin a déclaré que « Le Génocide était une horreur absolue ». Ceux qui ont été tués dans le Génocide ont été exterminés dans une mort cruelle et atroce, avec des tortures inimaginables. Mort par décapitation, par balle, extermination après viols.

Il a déclaré que les survivants du Génocide se sont battus pour survivre et continuer leur vie. Maintenant, ce qu’ils veulent, c’est obtenir justice.

Ceux qui ont participé au Génocide doivent être jugés et tenus responsables de ce qu’ils ont fait.

Cette mère, lors de son témoignage, a mentionné certains noms des personnes tuées lors du Génocide, notamment sa mère, ses frères, ses oncles, ses tantes et leurs enfants.

Le présent procès a débuté le 09 Octobre dernier. Jusqu’à présent, Pierre Basabose ne s’est pas présenté devant les jurés pour cause de maladie et il est représenté par son avocat, Me Jean Flamme.

Un total de quarante témoins devront faire leurs dépositions durant ce procès. (A suivre…).