Une Agence Panafricaine de la Gestion des Désastresa déjà créé une assurance et a payé $80 millions aux premiers pays sinistrés

Mohamed Béavogui, DG de ARC et Sous-Secrétaire Général des Nations Unies.

Kigali: Une Agence Panafricaine de la Gestion des Désastres, ARC, a déjà créé une assurance en cas de catastrophes naturelles et a déjà payé $ 80 millions aux premiers pays sinistrés, et elle compte aller de l’avant en renforçant ses capacités. Lire l’interview par son DG et Sous-Secrétaire Général des Nations Unies, Mohamed Béavogui (M.B.), à André Gakwaya de RNA, lors de la réunion de ARC à Kigali, ce 28 Novembre 2019 :

ARI- Vous pouvez vous présenter brièvement

M.B – Mon nom c’est Mohamed, je suis Sous-Secrétaire Général des Nations Unies et en même temps Directeur Général de la Mutuelle Panafricaine de Gestion des Risques (ARC, en anglais).

ARI – Quel est l’objectif de cette réunion de Kigali ?

M.B. – J’ai rejoint l’ARC en 2015 en tant que premier directeur de l’institution. L’objectif de ARC est d’aider les gouvernements africains à gérer et à financer les désastres provoqués par le risque climatique. ARC a commencé pleinement à fonctionner en 2015, même s’il a été créé sur le plan juridique en 2012. Le premier défi auquel il a fait face, c’était la sécheresse. C’était le plus grand péril dans bon nombre des pays africains. La sécheresse affectait beaucoup de populations, surtout des populations rurales, sachant que plus de la moitié de la population africaine vit en milieu rural et vit de l’agriculture. Quand il y a sécheresse, cela affecte sérieusement les moyens de subsistance de ces populations-là. ARC est une institution spécialisée de l’UA et a pour mandat de mettre en place tous les instruments nécessaires, techniques et financiers, afin d’aider les pays africains à répondre à ces risques climatiques-là. Donc, en commençant par la sécheresse, ARC a commencé par développer un outil, un modèle qui permet aux pays d’une part de définir le profil de risque du pays c.-à-d. quelles sont les chances qu’il y ait la sécheresse dans le pays pendant une période et combien de gens peuvent être affectés ? Et ceci grâce à des données satellitaires qui permettaient de donner l’information, dans laquelle sont aussi inclus la pauvreté, la vulnérabilité, les comportements hydriques de certaines plantes prioritaires. Avec cela, le pays peut savoir quel est le nombre de personnes qui peuvent être affectées pendant un certain nombre de temps ? On peut trouver des solutions qui exigent des ressources, et on essaye de déterminer comment trouver ces ressources.

Depuis 2015, il y a 33 pays qui ont signé le traité sur les 54. Il y a 20 avec lesquels nous travaillons. Vous comprenez qu’on ne peut pas travailler tout de suite avec tout le monde parce qu’il faut développer l’institution en même temps qu’on veut rendre service. Mais aujourd’hui, nous avons payé aux Etats qui ont souscrit à notre programme d’assurance. Et dans le premier programme d’assurance que nous avons mis en place, nous avons payé à ces Etats-là près de 80 millions de dollars. Donc, l’argent africain, qui aide à aider les africains, les pays africains quand il y a des problèmes de risque. Vous imaginez que c’est quand même quelque chose d’inédit et pour une fois l’Afrique a pris en mains, suite à la décision des Chefs d’Etat, ses problèmes de désastres climatiques. Voilà donc, 2015 bientôt 2020, cinq ans que nous travaillons, et maintenant c’est le moment de faire le point, d’apprendre sur nos leçons, de regarder le monde autour de nous, de nous projeter dans l’avenir, et c’est ainsi que nous avons organisé la 7ème session de la COP (conférence des parties), c’est l’instance la plus haute au niveau de la gouvernance de l’ARC, le conseil des ministres si vous voulez. C’est la 7ème COP, cette COP est extraordinaire. Elle discute uniquement l’évolution d’ARC, donc notre progrès au sein d’ARC. Le nouvel ARC, c’est quoi, une nouvelle stratégie 2024, c’est un nouveau mode de gouvernance, une autre approche par rapport à notre conseil d’administration, à notre gestion managériale intense, à notre mode opératoire, notre structure. Ce travail a été fait et maintenant nous le présentons à nos ministres, nos gouvernements, en leur disant : « vous nous avez demandé de faire le point, nous avons fait une série d’études, voilà ce que nous avons trouvé, voilà ce que nous vous proposons. Voilà ce que nous faisons aujourd’hui, pour avoir à la fin les recommandations des Etats. Nous allons corriger notre copie pour qu’en mars à la session ordinaire, les adoptions soient faites pour que nous lancions la transformation de ARC et aller au palier suivant, et répondre de façon plus efficace aux besoins du continent.

ARI – Quand vous dites qu’il n’y a que vingt pays qui travaillent avec nous, cela veut dire ….

M.B. – Cela veut dire qu’il y a vingt pays qui on signé l’accord de collaboration avec nous pour aller dans des programmes très concrets. Le Rwanda fait partie. Nous sommes actuellement très avancés avec le Rwanda. Nous avons un accord de collaboration, nous avons un plan de travail, nous faisons actuellement la formation. Parce que ce que nous ne voulons pas travailler pour les pays, mais avec les pays. Nous voulons donner les outils, les méthodologies pour que, eux-mêmes, puissent analyser leur profil de risque. Eux-mêmes avec note assistance arrivent à déterminer quels sont les meilleurs choix pour le pays. Une fois que nous avons fini c’est à eux de continuer, sur la base des outils qui sont à leur disposition, de pouvoir conseiller les gouvernements en leur disant: «voilà le risque nous arrive, qui peut nous arriver et voilà la direction qu’il faut prendre et le type d’outil qu’il faut mettre en place dans le pays».

ARI – Combien de pays s’acquittent de leurs cotisations ?

M.B. – Jusqu’à présent, nous n’avons pas de cotisation. Parce que nous sommes un mécanisme qu’on veut monter sur la base du marché. Nous avons obtenu une petite assistance pour un tout petit secrétariat. Mais à coté, nous utilisons l’assurance, nous avons créé une compagnie d’assurance qui fonctionne sur un modèle totalement privé, donc sur l’autosuffisance. Cette compagnie d’assurance est celle qui offre des contrats d’assurance aux pays. C’est sur la prime que tout est couvert. Mais dans le futur, il faudra voir comment on peut demander de petites contributions pour voir comment on peut continuer à couvrir la recherche, le renfoncement des capacités. Vous savez que c’est beaucoup de modélisations, d’analyses des données, d’évolutions vers l’intelligence artificielle. Nous commençons à discuter avec des institutions come AIMS pour que de plus en plus ça soit les Africains qui prennent ça en mains, et qu’avec les technologies modernes, qu’on puisse répondre à la demande.

ARI – Quels sont les moyens qui vous ont permis de survivre jusqu’à présent ?

M.B. – Ils sont nombreux. Les premiers qui ont cru en nous est la fondation Rockefeller. Il y a eu l’Angleterre avec DFID, l’Allemagne, la France, les Etats-Unis, la Suède, la Suisse et le Canada qui est venu massivement nous apporter son appui même s’il était parmi les derniers à arriver, mais finalement c’était le plus gros appui que nous avons reçu et le plus désintéressé.

Comme je vous l’ai dit, nous sommes une petite agence. Nous sommes une cinquantaine de personnes.

ARI – Basées en Afrique du Sud ?

M.B.- En partie. Le siège principal provisoire est en Afrique du Sud. Mais nous avons un bureau régional en Afrique de l’Ouest. A cause comme vous le savez des distances en Afrique. Ça permet à une équipe sur place d’opérer dans la région là-bas. Et actuellement nous avons lancé un appel à concurrence pour avoir un siège définitif.

ARI – Etes-vous une agence de l’UA ?

M.B.- Nous sommes une agence spécialisée de l’UA. C’est comme si vous disiez la FAO est une agence spécialisée des Nations Unies, l’ONUDI ou autre chose. Donc c’est ça. Nous avons un mandat très clair. Et pour être membre, il faut signer le traité et le ratifier.

ARI – Qu’est-ce que vous attendez de particulier aujourd’hui ?

M.B. Aujourd’hui nous avons besoin de critiques, de commentaires sur tout ce que nous avons proposé pour le futur de ARC, pour le prochain palier de ARC. Nous espérons recevoir des commentaires, des recommandations pour pouvoir finaliser ce travail, le clôturer, le présenter au début de l’année et avoir les bénédictions de nos Etats membres afin de passer à la 2ème phase du développement de notre institution. (Fin)

Photo groupe des participants