L’écrivain Wilfried N’Sondé donnent des explications qui rendent son récent septième ouvrage «Héliosphéra, fille des abysses» plus intelligible

L’écrivain Wilfried N’Sondé (avec micro) et son ami écrivain Sénégalais Prix Goncourt 2021, Mohamed Mbougar Sarr, durant un panel à Kigali

Lors des Rencontres Internationales du Livre Francophone organisées du 01 au 04 Mars 2023 à Kigali par l’Institut Français, l’écrivain Wilfried N’Sondé (W.N) a présenté son 7ème et plus récent roman intitulé « Héliosphéra, fille des abysses » qu’il vient de publier. Wilfried N’Sondé est un écrivain musicien polyglotte totalisant 17 Prix Littéraires. 

Le Journal Le Monde a relevé qu’il n’aimait pas les assignations identitaires et qu’il créait des personnages inclassables. A son image ? Il est né à Brazzaville, a grandi près de Paris, a vécu vingt-cinq ans à Berlin, et il s’est installé à Lyon. Il a accordé une interview exclusive à André Gakwaya de l’Agence Rwandaise d’Information (ARI-RNA) dans laquelle il émet des lumières sur son dernier ouvrage « Héliosphéra, fille des abysses. Lire son entretien : 

ARI- Qu’est-ce que vous avez présenté dans votre intervention? Brièvement, pour que les gens comprennent votre ouvrage

W.N. – Je suis venu ici à Kigali bien sûr pour retrouver la ville mais aussi pour présenter mon dernier roman « Héliosphéra, fille des abysses ». C’est une histoire d’amour, des planctons. Voilà. Les planctons sont des organes microscopiques qu’on ne peut pas voir, qui vivent dans les océans, les mers, les fleuves, les rivières, dans les lacs depuis 500 millions d’années. Ce sont eux qui par leurs activités biologiques produisent 50 à 60 % de l’oxygène que nous respirons. A ce titre, nous sommes obligés de considérer qu’ils sont très, très importants, qu’ils sont essentiels. Je dirais même que nous leur sommes redevables. C’est grâce à eux que nous respirons et que nous pouvons vivre. Moi je me suis intéressé à ces organismes-là, même si on ne les voit pas. Ils sont là et ils sont donc importants. Et pour les rendre plus accessibles à chacune, à chacun, j’ai raconté une histoire d’amour entre deux de ces petits organismes-là. Et ce qui est fantastique, c’est que ces organismes ont la capacité parce qu’ils sont des animaux, d’autres sont des végétaux, et ils ont cette capacité à pouvoir s’unir même de manière charnelle entre végétaux et animaux, et c’est important pour moi de raconter cela parce que le plancton nous prouve que la différence la plus grande entre deux êtres vivants sur cette terre peut produire, créer l’union la plus féconde. Parce que quand ces végétaux et ces animaux s’unissent, ils forment un nouvel être qui vit en symbiose, en harmonie, qui n’a plus de stratégie de prédation. Donc, ils vivent dans la paix. Je trouve que c’est une belle image, voire une belle leçon pour l’humanité. Aimons la différence de l’autre et en rapprochant nos différences, on devient plus fécond.   

ARI- Comment avez-vous fait pour voir ces êtres microscopiques ?

W.N. – J’ai participé à une mission océanographique sur l’océans pacifique au large du Chili en Amérique du sud. Et le travail des scientifiques c’est de faire des prélèvements d’échantillons d’eau, ensuite on emmène sur le bateau et on prend une portion et on observe tous les êtres qui vivent dans l’eau au microscope. Et c’est là qu’on découvre le peton animal, végétal ainsi de suite. Et c’est là qu’on peut observer comment ils s’unissent. Voilà, c’est en regardant ça au microscope.

ARI- Expliquez-nous le rôle de l’héroïne du roman.

W.N. – Oui, oui dans ce roman-là je raconte la naissance de Héliosphéra, et je raconte comment elle se nourrit, comment elle se met en recherche d’un autre plancton avec lequel il va s’unir et à la fin ils se sont unis. Donc, on va de sa naissance jusqu’à son union.

ARI-  Vous leur avez attribué des comportements humains ?

W.N. – Pas du tout. Ce sont des comportements qui leur sont propres.  Mais dans leur comportement, on retrouve des comportements humains. Mais quand je décris leur comportement, je me base sur ce que les scientifiques savent et sur ce qu’on observe au microscope. Effectivement, ce qui est troublant, je ne leur attribue pas quoi que ce soit. C’est leur comportement.  Comme ils sont depuis 500 millions d’années, donc ils étaient là avant nous. Ce sont nos comportements qui ressemblent aux leurs, et pas l’inverse.

ARI-  Est-ce qu’ils ont un âge ?

W.N. – Le plancton vit de trois à quatre jours. Pour nous, c’est très peu. Mais nos vies sont très peu comparées à la vie des baleines par exemple. Encore très peu comparées à la vie de certains arbres. Certains arbres peuvent vivre jusqu’à 300 ans.

ARI-  Les baleines, c’est combien d’années?

W.N. – Les baleines peuvent vivre jusqu’ à cent ans. Mais les arbres peuvent vivre 300-400 ans. Donc les arbres nous regardent avec mépris. Ils disent mais ces gens-là, c’est quoi ? Ils vivent 60, 70 ans et ils meurent même. Eux, 400 ans, ils sont là.

ARI- Que voulez-vous mobiliser en écrivant sur le plancton ? Pour dire qu’ils sont importants ?

W.N. – Il faut savoir que ce sont ces organismes qui vivent dans l’eau qui nous fournissent leur oxygène. Il faut le savoir. Pourquoi ? Parce que si on pollue l’eau, beaucoup de ces organismes vont mourir et nous allons étouffer.

ARI- Cinq semaines en mer…Vous viviez de quoi ?

W.N. – Nous étions 14.  Il y avait une cuisinière, une correspondante de bord, cinq marins, six scientifiques, et moi. On avait tout et on a fait des escales pour refaire des achats et des réserves. On mangeait bien d’ailleurs.

ARI- Comment a été l’accueil de l’ouvrage ?

W.N. – Le livre est sorti en Octobre 2022. Il a eu une très bonne presse. Beaucoup d’articles dans la presse nationale française. J’ai fait beaucoup de rencontres en librairies, festivals de littérature et ça va continuer. J’ai des rendez-vous jusqu’au mois de Septembre. Il a été tiré à 12.000 (douze mille) exemplaires. Considérant qu’un succès, c’est 6000 (six mille), je suis très, très satisfait et mon éditeur aussi.  

ARI- Cela vous a rapporté.

W.N. – Oui, moi je suis un professionnel de la littérature, les livres me rapportent de l’argent parce que les gens les achètent.

ARI-  C’est le quantième livre ?

W.N. – C’est le 7ème roman. J’ai aussi écrit un recueil de poésies, j’ai participé à deux livres de photos et moi j’ai écrit les textes.   

ARI- Qu’est-ce que vous faites dans la vie ?

W.N. – Je publie, j’écris, je fais des rencontres littéraires dans les libraires, les festivals, les universités, dans les lycées et c’est comme ça que je gagne ma vie.  

ARI- Est-ce vos livres sont enseignés dans les écoles ?

W.N. – Oui. Depuis mon premier roman. Je ne suis pas au courant de rien du tout, mais je sais que certains de mes livres sont au programme de certaines académies en France, ils sont aussi étudiés dans d’autres pays comme la Corée du Sud, l’Allemagne, au Mexique, en Angola.  

ARI- Quel est votre message …

W.N. – J’espère qu’on va développer des comportements de fraternité pas seulement entre nous les humains, mais avec tous les êtres vivants qui nous entourent. Le plancton, l’arbre, c’est mon frère, ma sœur comme vous êtes mon frère, comme Richard qui est à côté de moi est mon frère. Et ça ne m’intéresse plus qu’il a cette couleur de peau, cette nationalité, cette religion, cette conviction politique, ça ce n’est pas important. Ce qui est important, c’est qu’on est des êtres vivants sur cette terre, et on est plus heureux si on se considère comme des frères et des sœurs, dans le respect de tout ce qui vit. (Fin)