Les ARV ont recréé l’espoir

Veuve depuis 2004, suite au VIH/Sida,  Adeline a perdu son mari qui lui a laissé un enfant sain, actuellement âgé de 9 ans.

Adeline Umutoni a un très bon moral et une vie normale. Personne ne peut penser qu’elle est séropositive. L’entourage familial a été pour elle un appui très appréciable. A la mort de son mari,  elle était désespérée, rongée par la maladie et la faiblesse. Deux fois, elle est allée faire le dépistage au VIH/Sida. Mais la peur de se trouver  avec un résultat positif l’a obligée à rentrer sans avoir osé faire les examens nécessaires.

Ce n’est qu’à la troisième fois, accompagnée de sa petite sœur et à moto, qu’elle a accepté d’écouter les conseils et de subir le dépistage. Elle se sentait cette fois prête à accepter le verdict des examens.

Et effectivement, elle a été informée de sa séropositivité qu’elle a sereinement assumée. Elle a été, depuis lors jusqu’aujourd’hui, soumise au régime des ARV.

 « Si j’ai été courageuse, c’est grâce à mon frère et à ma soeur qui m’ont garantie de leur constant soutien. Les ARV aussi ont amélioré ma santé et m’ont redonné l’espoir et la vie », confie-t-elle calmement.

L’autre chance d’Adeline Umutoni est que son mari lui a laissé un enfant sain de deux ans qui fréquente une bonne école aux frais d’un oncle très attachant.

Adeline croît que son mari a attrapé le VIH/ Sida avant la naissance de l’enfant. Comment donc l’enfant n’a-t-il pas été séropositif ?

Le médecin d’Adeline Umutoni qui suit cet entretien rétorque : « Parce que vous pouvez être séropositif et avoir un enfant ou des enfants sains, non porteurs du VIH/Sida, alors que vous n’avez pas suivi le programme de protection de l’enfant à la naissance ».

« Pour un enfant né d’une mère séropositive, le risque de transmission dans un contexte africain sans intervention du PTME (Prévention de la transmission de la mère à l’enfant), est de 30 à 40% », poursuit-il, en citant un paragraphe d’un document de la 3ème conférence pédiatrique africaine de l’année 2006 qu’il a dans les mains.

Adeline affirme qu’elle doit la vie au test volontaire qui lui a révélé sa séropositivité à temps, au régime des ARV qu’elle a suivi et aussi au soutien très compréhensif et très affectueux de sa sœur, de son frère, puisque les autres membres de la famille ont été tués pendant le génocide de 1994.

Ensuite, elle n’a pas connu la mise à l’écart ou la stigmatisation dans son milieu social et professionnel. Disciplinée et très attachée à la religion, elle garde le moral haut surtout qu’elle ne développe pas de maladies opportunistes.

Elle fait partie de plus  de 350 membres de l’Association des veuves du génocide (AVEGA) qui sont sous le régime des ARV. Un chiffre qu’avance la Secrétaire Exécutive de cette association, Assumpta Umurungi, en rappelant les multiples affres qu’a causées le génocide de 1994.

« Les ARV ont permis à certains séropositifs de gagner du poids, de passer de 40 à 70 kg et d’exercer leur profession sans entrave. Ceux qui étaient à l’université ont pu terminer leurs études sans encombre », fait-elle remarquer.

Au propos des mariages entre séropositifs, il a été rappelé que les personnes infectées ne devraient pas par principe se marier ou avoir des enfants. Mais le constat est que, selon les entretiens avec certains patients, un homme séropositif et une femme séropositive peuvent s’entendre pour mener une vie de couple marié pour s’entraider  à supporter les duretés de la vie.

Il leur est conseillé d’utiliser des préservatifs dans leurs rapports sexuels, « car les deux individus n’ont pas  la même sensibilité aux ARV. S’ils ne se protègent pas, ils pourraient développer une résistance », avance le médecin.

Stigmatisation

Minani Thaddée a 46 ans. Il est marié et père de trois enfants tous sains âgés respectivement de 22 ans, 18 et 5 ans. Il vit avec une deuxième épouse depuis leur mariage en 1998, juste cinq mois après la mort de sa première femme, décédée la même année, d’une maladie.

C’est une année après, en 1999, suite à une santé très défectueuse, que Minani s’est résolu à faire le dépistage au VIH/Sida. Le résultat a prouvé que Minani est séropositif. Dès lors, Minani a sombré dans l’épouvante et la panique. Et dans le silence aussi. Durant trois mois, il s’est tu. Il n’a pas osé confier l’information à sa femme.

Finalement, la peur s’est estompée. Et Minani a confié son problème à son épouse, qui a fait preuve d’une grande compréhension.

« Depuis 2002, suite à des maladies opportunistes, la santé qui dégénérait et à l’amaigrissement, le médecin m’a soumis au régime des ARV. J’avais 57 kg et aujourd’hui, j’ai 60 kg. Je ne souffre plus de maladies opportunistes, sauf les yeux qui me font constamment mal », témoigne-t-il.

Mais le problème d’yeux, lui, est une simple allergie sans nul danger.

L’essentiel qu’on peut reconnaître, c’est que le régime des ARV a permis de stabiliser l’état de santé de cet agri-éleveur qui a la chance d’avoir les produits alimentaires nécessaire pour respecter le régime alimentaire prescrit par le médecin.

Il a des vaches qui lui donnent du lait, des poules qui lui fournissent des œufs, ainsi que des légumes et divers arbres fruitiers sur lesquels poussent des oranges, des avocats, etc.

« J’ai tout ce qu’il faut pour supporter la prise des médicaments », dit-il.

Le médecin de Minani présent sur place ajoute que son service dispense  un appui nutritionnel aux séropositifs sous ARV.

Mais les trois sœurs de Minani, elles, ont affiché la plus radicale des stigmatisations envers leur frère. « Elles m’ont rejeté, isolé et ne veulent même ni me voir, ni me parler », dit-il.

« Je participe à des discussions et autres réunions publiques d’échange sur le VIH/Sida, que ce soit au niveau des secteurs ou des radios. Je témoigne. J’ai assumé ma maladie », poursuit-il.

Quand on prend ce genre de médicaments, on a tendance à manger. Les services qui donnent des ARV doivent en conséquence octroyer un  supplément nutritionnel à leurs patients.

« Une personne sous ARV doit avoir un régime alimentaire complet fait de protides, de lipides et de glucides. Ainsi que des éléments vitamineux, tels des fruits », rappelle le médecin.

Minani reconnaît que les ARV augmentent la force physique pour permettre de travailler.

« Mais n’empêche que mon rendement a diminué. Avant de tomber malade, je restais dans mes champs pendant 6 h. Aujourd’hui, après 3h, la fatigue me gagne », regrette-t-il.

Le médecin rappelle ici que les malades sous ARV ne fument pas et ne prennent pas d’alcool.

Minani Thaddée a confié aussi que son troisième enfant de 5 ans est né suite à sa propre erreur en tant que père.  « Je ne suis pas parvenu à me contrôler. J’ai continué des rapports sexuels avec mon épouse qui est tombée enceinte », avoue-t-il.

Mais l’enfant a été protégé selon les principes du PMTE à la naissance. Et il est sain  grâce à la distribution des ARV aux personnes vivant avec le VIH/Sida (PVV). Autre chose: les morts dues au VIH/Sida ont sensiblement diminué. Ceux qui visitent les hôpitaux  s’en rendent compte, car, les lits surpeuplés de moribonds qui attendent la mort ne font plus  scandale dans les salles des pavillons.

Les ARV ont permis aux PVV de continuer à vivre, de poursuivre les études même universitaires ou d’exercer diverses professions. Mais cela n’empêche pas qu’il y ait malheureusement l’un ou l’autre cas de décès dû aux complication des maladies opportunistes comme les méningites, la tuberculose etc.

Selon un médecin dans la Ville de Kigali, il arrive qu’un couple infecté souhaite avoir un enfant. Dans ce cas, quand la femme devient enceinte, on peut l’aider à avoir un enfant non infecté.

 Il s’agit ici de mettre en application les principes prônés par le programme de transmission de la mère à l’enfant (PMTE). On administre à la mère un médicament appelé la névirapine AZT qui empêche  que l’enfant soit infecte à la naissance.

Dès la naissance de l’enfant aussi, pour éviter toute éventuelle infection au VIH/Sida due à l’allaitement, la mère peut opter pour l’allaitement artificiel. C’est-à-dire  donner du lait en poudre et autre, sans que l’enfant touche au sein maternel durant les six premiers mois. C’est une famille qui a les moyens qui peut recourir à cette voie. Mais pour les familles indigentes, l’on conseille un allaitement maternel exclusif, c’est-à-dire  sans donner du lait guigoz ou des jus, jusqu’à 6 mois. Après ces  6 mois, on fait un sevrage ; et on soumet l’enfant à un régime alimentaire normal.

De l’allaitement maternel

Les recommandations de l’OMS, UNICEF, ONUSIDA sont formelles.

« Lorsque l’alimentation de substitution est acceptable, faisable, abordable, financièrement, durable et sûre, il est recommandé aux mères infectées d’éviter toute forme d’allaitement au sein ». Sinon, l’allaitement maternel exclusif est recommandé pendant les premiers mois de vie. Et devrait alors être arrêté le plus tôt possible.

L’on doit noter que d’habitude, les médecins recommandent à une mère ou un couple infecté de ne pas avoir d’enfant. Mais s’il arrive que la mère soit enceinte, elle doit savoir qu’avec  l’allaitement de l’enfant, il y a plus de risques que cet enfant soit infecté. Raison pour laquelle l’allaitement artificiel s’avère la meilleure option.