Les Banyamulenge craignent un ratissage ethnique, ils ont saisi l’EAC

Le centre de Minembwe

Les notables et leaders de la communauté Banyamulenge à Minembwe (province du Sud-Kivu, est de la RDC) ont adressé une correspondance au président burundais Évariste Ndayishimiye, en sa qualité de président en exercice de l’EAC (Communauté Est-Africaine). Ils alertent sur un plan d’«épuration ethnique » visant les membres de la communauté Banyamulenge. Le président Ndayishimiye n’a pas encore réagi. 

Dans leur lettre dont une copie a été réservée à tous les présidents de pays membres de l’EAC excepté le Soudan du sud, les notables dénoncent un plan de « nettoyage ethnique » de leur communauté.

Selon le Collectif SOS Médias Burundi qui livre cette information, ces notables banyamulenge citent des opérations militaires des FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo) appuyés par des troupes burundaises et un groupe Maï-Maï.

Les 29, 15 et 7 décembre 2022, ainsi que le 9 octobre de cette année sont les dates que citent les notables Banyamulenge comme exemples d’exécution systématique d’un plan qualifié de « ratissage ethnique ».

Au cours de ces dates, des membres de cette communauté composée des Tutsi originaires de la province congolaise du Sud-Kivu ont été tués.

« […], l’épuration ethnique est programmée par les FARDC appuyées par les troupes burundaises à Minembwe », accusent les notables.

Ils énumèrent les noms des victimes et chargent un officier de l’armée congolaise d’être très actif dans les assassinats.

Le président burundais qui est l’actuel président en exercice de l’EAC n’a pas encore réagi. Mais, la communauté Banyamulenge lui demande de « faire attention » au moment où les troupes venues de son pays « prêtent main- forte à un plan d’épuration ethnique au lieu d’agir dans le cadre de la force régionale de l’EAC pour protéger la population et ses biens sans distinction de race, d’ethnie ou de tribus ».

La correspondance a été signée par treize chefs coutumiers de la commune rurale de Minembwe. Une copie a été réservée à Uhuru Kenyatta, l’ancien président du Kenya et facilitateur dans la crise congolaise notamment.

Même si les Banyamulenge accusent les FARDC de préparer « un nettoyage ethnique », le chef d’état-major adjoint de l’armée congolaise en charge des opérations a indiqué le mercredi 4 janvier 2022 que  » […] la défense et l’intégrité nationale, la protection de la population et ses biens doivent être le socle de notre mission comme FARDC ». Le général Chiko Tshitambwe Jérôme était en déplacement à Minembwe sur le territoire de Fizi. Il s’y était notamment rendu dans le cadre de supervision des opérations conjointes entre les armées burundaise et congolaise contre Twirwaneho, un groupe armé composé de jeunes Banyamulenge.

« Les militaires burundais sont venus nous appuyer afin de mettre hors d’état de nuire tous les groupes armés locaux et étrangers », a-t-il ajouté.

Les Banyamulenge est une communauté congolaise composée de pasteurs. Ils sont considérés par plusieurs autres tribus comme des ressortissants rwandais parce qu’ils parlent une langue proche du Kinyarwanda.

Ils disent avoir été persécutés sur plusieurs années. Avec la résurgence du M23, un groupe armé composé de Tutsis congolais depuis fin 2021, les communautés rwandophones vivant en RDC sont accusées au même titre que le Rwanda de « soutenir les rebelles ». L’ONU a dénoncé un discours de haine alarmant visant ces communautés ainsi que l’incitation à la violence publique contre elles. Elle a appelé les autorités congolaises à « mettre fin à cette rhétorique ». Mais le président rwandais Paul Kagame estime que « la communauté internationale rend hommage à la paix du bout des lèvres ».

Au moins 1700 Congolais parlant le Kinyarwanda pour la plupart originaires de la province du Nord-Kivu ont trouvé refuge au Rwanda lors des dernières semaines. Ils disent fuir les persécutions dont ils sont victimes, étant assimilés à « des ennemis du Congo et étrangers ».

Le président Kagame a récemment affirmé que son pays abrite plus de 70 mille réfugiés congolais, membres des communautés rwandophones regrettant que « […] pourtant la communauté internationale prétend que ces gens n’existent pas….Le plan semble pour eux qu’ils restent indéfiniment au Rwanda ce qui sert seulement à blanchir le mensonge selon lequel ils sont normalement des Rwandais qui méritaient d’être expulsés ». Pour M. Kagame, « ceci est un problème international qui requiert une solution internationale ».

Le président Félix Tshisekedi a appelé les Congolais à s’abstenir des actes de haine contre les Rwandais estimant que « c’est le régime rwandais avec Paul Kagame à sa tête qui est l’ennemi de la République Démocratique du Congo ».

Pour le président du vaste pays de l’Afrique centrale dont la partie est vient de passer trois décennies dans l’insécurité causée par des groupes armés locaux et étrangers et dont des hauts gradés de l’armée et représentants du gouvernement central sont accusés de « collaborer avec les rebelles », « les Rwandais et Rwandaises ont besoin de notre aide parce qu’ils sont muselés. Ils ont besoin de notre aide pour se libérer. Ils ont besoin de notre solidarité pour nous débarrasser et débarrasser de l’Afrique de ce genre de dirigeants rétrogrades qui ramènent les méthodes des années 60 et 70 ». (Fin)