Rencontres du Livre Francophone 3ème Edition 2024 : Trente écrivains présentent leurs ouvrages

Vue de la salle: au premier plan: Le Ministre J.D. Bizimana et l’Ambassadeur Antoine Anfré

Le Centre Culturel Francophone (CCF) organise du 06 au 09 Mars 2024 à Kigali, la 3ème Edition des Rencontres du Livre Francophone (RLF) qui se focalise sur des ouvrages axés sur le Génocide des Tutsis, et en ce mois de la Francophonie, une trentaine d’écrivains y participent à la veille de la 30ème Commémoration du Génocide.

« Les livres francophones ont contribué à la connaissance de la vérité sur la perpétration du Génocide de Tutsis en 1994. Des écrivains ont beaucoup documenté la vérité sur l’histoire du génocide. Ils exposent des ouvrages qui éclairent la population et font reculer le mensonge et le courant négationniste. C’est une façon d’honorer la mémoire des victimes du Génocide des Tutsis et renforcer la résilience des survivants. C’est aussi une façon de renforcer les capacités des Rwandais pour aller toujours de l’avant », a indiqué le Ministre de l’Unité Nationale et de l’Engagement Civique, Dr Jean Damascène Bizimana, lors de l’ouverture du Colloque.

Pour l’Ambassadeur de la France au Rwanda, Antoine Anfré, beaucoup d’ouvrages sur le génocide, sur la justice pénale et la compétence universelle sont sortis et certains expriment des critiques contre la France, mon pays.

Aurélie Davos et l’Ambassadeur Joseph Nsengimana

« Quand le FPR a déclenché la guerre de libération, j’assumais le poste de l’adjoint de l’Ambassadeur de France à Kampala. Puis j’ai été affecté au Rwanda. Mon rôle a été d’envoyer à mes supérieurs des alertes pour éviter des dérapages. Mais je n’ai pas été entendu. Certes, l’on ne peut pas ressusciter les morts du génocide. Mais on peut travailler sur l’histoire, la mémoire et la justice pour éclairer la vérité, tout en redonnant la dignité aux victimes. Car, des gens ont beaucoup souffert, et cette 30ème Commémoration vise à leur redonner valeur et dignité aussi », a-t-il indiqué.

Parmi les trente écrivains qui présentent leurs ouvrages et échangent sur le bon futur des rapports entre la France et le Rwanda, et la nécessité de rendre plus saine le système de gouvernance démocratique dans ce pays, l’on peut citer Vincent Duclert qui a présidé la Commission de recherche sur la France, le Rwanda et le génocide. Il en a profité pour approfondir son travail sur la vérité historique des liens entre la France et le régime qui a commis le génocide. Il revisite l’intégralité des archives et les complète par des documents et témoignages inédits. Il décrit des systèmes de commandement militaire et politiques parallèles, les tensions avec les hommes de terrain. Il souligne enfin que tous les éléments étaient à la disposition de la présidence française pour que le génocide soit anticipé, compris et arrêté.

« Pourtant l’impensable s’est déroulé sous nos yeux », conclut-il, en précisant que le rôle de la France dans le génocide est un grand scandale de la 5ème République.

Au premier jour du colloque, Aurélie Davos, magistrate au tribunal de Lille a présenté son ouvrage sur la compétence universelle et la poursuite de suspects du Génocide des Tutsis au Rwanda et en France. Elle montre le rôle d’enquêteur et les défis rencontrés, surtout que les rapports d’alors entre le Rwanda et la France n’allaient pas dans le sens d’une bonne collaboration pour arrêter et juger les suspects. Mais avec beaucoup d’efforts, le moment favorable arrive et les procès se sont ouverts.

Le Prof. Raphaël Nkaka et Daphose Gauthier.

Un autre écrivain est le jeune Gaële Faye qui a publié « Petit Pays » retraçant le climat de violence et de discrimination d’un jeune métis dans des sociétés africaine et européennes qui ne l’adoptent pas entièrement, et le voient comme « un personnage de différence » à mettre quelque fois à l’écart. Ce qui engendre des tiraillements et des questionnements continus chez le héros du livre, chez qui compte d’abord « faire preuve toujours de plus d’humanité » dans son environnement. Ce message de visage humain est celui qui caractérise tout être humain et valorise les droits de chacun. C’est ce comportement qui contribue à la paix pour tout milieu.

L’autre écrivain français intervenu le premier jour du colloque qui est aussi journaliste à la Croix est Laurent Larcher. Il a déjà publié trois ouvrages sur le Génocide des Tutsis. Il écrit sur les crimes de masse comme la Shoa et le Génocide des Tutsis. Il s’intéresse aussi aux Bamiléké du Cameroun persécutés dans leur pays.

« Le naufrage de la France au Rwanda a été possible parce que le domaine de la politique française étrangère est réservé au seul président de la République. Il faut en faire un domaine partagé. La responsabilité de la France au Rwanda est d’avoir organisé le génocide », dit-il.

Pour tous ces écrivains, il importe de faire la recherche, réunir les preuves et témoignages sur les crimes afin d’établir la vérité et la responsabilité. Ce qui suit peut s’avérer l’amorce des formes de réparation. Notons que des Rwandais rescapés ont présenté aussi leurs témoignages durant le déroulement du génocide des Tutsis en 1994. C’est notamment la veuve activiste des droits de la personne, Speciose Kanyabugoyi, qui a perdu des membres de sa famille durant le Génocide, ainsi que l’Ambassadeur et Professeur Joseph Nsengimana. Le Professeur Raphaël Nkaka s’est focalisé sur l’idéologie du génocide. (Fin)